La fondation Konrad Adenauer vient de boucler en partenariat avec le CESTI, une session de formation au profit de l’Association des Journalistes en Régions Frontalières(AJRF) sur le thème « Travail des enfants dans les sites d’orpaillage traditionnel et Droits humains : Quels impacts sur l’Education ? »
La cérémonie d’ouverture a été présidée par M Habib Léon Ndiaye, préfet de Kédougou
Avec la prolifération vertigineuse de sites d’orpaillage dans la région de Kédougou, le système éducatif paie un lourd tribut. Il est noté une récurrence des absences des élèves, l’abandon scolaire élevé et des résultats aux examens catastrophiques dans certains écoles et établissements scolaires proches des sites d’orpaillage.
Raisons suffisantes pour que la Fondation Konrad Adenauer outille les journalistes membres de l’AJRF pour mieux interpeller l’opinion publique locale, nationale voire internationale sur ce mal propre à la région de Kédougou.
« Les journalistes sont d’excellents multiplicateurs d’informations. Nous sommes dans l’optique de bien les former pour qu’ils soient des journalistes citoyens qui vont prendre en charge ces questions.» a précisé Mme Ute Bocandé (photo), chargée des programmes de la fondation Konrad Adenauer.
L’Etat des lieux révèle que le travail des enfants dans les sites d’orpaillage est un phénomène bien réel.
Le travail des enfants dans les sites d’orpaillage
« Il est normal que les enfants viennent tenter leur chance ici dans les placers de Gada-Dinguessou. S’ils ont la chance, ils pourront trouver de quoi acheter leurs fournitures scolaires et aider leurs parents. Mais quand l’école ouvre ses portes, nous leur interdisons l’accès au site » a soutenu M Coly Diallo, orpailleur à Gada-Dinguessou.
Cette fréquentation des placers par les enfants agit sur l’atteinte des objectifs fixés à chaque maillon du système éducatif.
Le système éducatif est affaibli
« On note un taux d’abandon élevés entamant l’objectif national fixé à 5% au plus en 2015, un taux d’achèvement de 64,11% faible par rapport au taux national de 65,60%. Les droits à l’éducation et de l’obligation scolaire sont violés, les taux de redoublements élevés ayant des répercussions négatives sur les capacités d’accueil des écoles et des classes, sur le budget de l’Etat. Exemple: 7,94% au CE2 » a précisé M Amedy Dieng, inspecteur de l’Education et de la formation, juriste par ailleurs conférencier du jour.
Pourtant le Sénégal a ratifié plusieurs conventions et lois qui interdisent travail des enfants. il s’agit la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, la Convention relative aux Droits de l’Enfant du 20 novembre 1989 et la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 juin 1981 entre autres.
« Le code du travail stipule que les enfants ne peuvent être employés dans aucune entreprise, même comme apprentis, avant l’âge de quinze ans, sauf dérogation édictée par arrêté du ministre chargé du travail, compte tenu des circonstances locales et des tâches qui peuvent leur être demandées… » a précisé M Dieng.
Les droits des enfants sont violés
A Kédougou, malgré tout cet arsenal juridique, les enfants continuent à travailler, parfois très durement dans les sites d’orpaillage traditionnel.
C’est avec beaucoup de regrets que M C (nom d’emprunt) nous raconte son calvaire dans le bureau du principal du collège1 de la commune de Kédougou situé à quelques kilomètres du site de Gada-Dinguessou.
« Certains enfants fréquentent les placers parce que leurs parents sont pauvres. Moi, j’ai fréquenté le site de Tenkoto, l’année dernière. Le travail qu’on nous propose là-bas est très difficile. Il faut remonter le sable du fond des puits d’orpaillage ou piler les pierres avec des marteaux, des mortiers en fer. Je regrette d’y aller, maintenant je voudrai reprendre mes études … »
Il faut dire que cette situation n’a pas laissé les autorités sans réactions. Au niveau local, des efforts sont en train d’être déployés en faveur de la protection des droits de l’enfant.
Des mesures pour protéger l’enfant
«Un arrêté a été pris pour réglementer l’orpaillage, il y a aussi la mise en place du comité départemental de prise en charge de l’Enfant(CDPE). Les journalistes ont un rôle important à jouer étant donné qu’ils peuvent aider à la réorientation des décisions que les pouvoirs publics prennent. Il faudrait prendre un recul et adopter une approche objective et critique pour apporter des solutions à cette situation » a rappelé M Habib Léon Ndiaye, préfet de Kédougou.
C’est pourquoi, les journalistes ont mis du sien pour profiter entièrement des de ces deux jours de formation. Ils ont mis à profit les éclairages et conseils apportés par M Hamidou Sagna journaliste, à la gazette facilitateur de cette session de formation.
« Un journaliste doit respecter la vérité, rectifier une information qui s’avère fausse, garder le secret professionnel et de ne pas publier les sources, s’interdire le plagiat, la calomnie, la diffamation… » a-t-il conseillé.
Ainsi, les participants ont-ils pris l’engagement de continuer le combat dans la conscientisation des populations sur les dangers de l’exploitation des enfants dans les sites d’orpaillage traditionnel.
« Nous allons jouer notre partition afin que ces messages soient entendus. Les enfants n’ont pas de place dans les placers. La responsabilité incombe à tout le monde » a précisé M Mouhamadou Lamine Barro, secrétaire général de l’AJRF.
Une cérémonie de remise d’attestations a mis fin à ces deux jours de formation. Par la même occasion, l’AJRF a remis solennellement des attestations de remerciement à la Fondation Konrad Adenauer pour ses efforts consentis pour le renforcement de capacités des Journalistes.
Adama Diaby Kédougou xibaaru.com