Un silence coupable

Un silence Criminel (sur les petits talibés de la rue)
En gardant le silence sur ce spectacle d'enfants, le Sénégal se fait complice de crimes.
La ressource humaine est le pivot inéluctable de toute stratégie de développement durable. Pour
préparer l'homme à servir sa société, il convient de le protéger, de le soigner, de l'éduquer et de le
former dès son plus jeune âge pour l'amener à grandir avec des valeurs bien encrées d'Homme et
de Citoyen. Un pays comme le Sénégal se vante d'avoir réalisé des pas de géant sur le chemin
difficile de la démocratie et des droits de l'Homme, mais garde un silence criminel face au
spectacle déplorable des enfants à peine affranchis de la fleur de l'âge, mendiant dans la rue,
morveux, puants, pieds nus, ouverts à tous les risques sanitaires. a Toute société qui prétend
assurer aux hommes la liberté doit commencer par leur assurer l'existence ".
Quel est ce pays où une maman, après avoir assumé de longs mois de maternité et risqué sa vie en
donnant la vie, est capable de regarder le fruit de ses entrailles tendre la main aux passants, se
nourrir dans les poubelles, s'exposer aux risques mortels de la rue ? Quel est ce pays où la
religion, au lieu de rendre à l'Homme toute sa dignité, est utilisée comme prétexte pour mendier ?
L’analphabétisme, le dogmatisme et le fatalisme conduisent des couples à faire des enfants sans
vraiment réfléchir sur les moyens pour les élever et les entretenir. Des femmes, sous la pression
des maris tyranniques et inconscients, attendent un enfant sans pouvoir faire face aux coûts des
visites prénatales indispensables ni même s'offrir une alimentation conforme à leur état et
favorable au développement normal de la vie intra-utérine qu'elles portent. On fait un enfant et
lorsqu'on se sait incapable de l'entretenir, on l'<"offre" à sa tante, à son frère ou à son cousin
comme un objet, un fardeau dont on se décharge. C'est une honte !
Des maîtres coraniques envoient des enfants dans la rue aux heures creuses de l'apprentissage du
Coran en prétendant les initier à l'humilité et aux difficultés de la vie. Ce raisonnement est
irrecevable pour quiconque est conscient de la valeur de l'être humain et de la vulnérabilité de
l'enfant. Enseigner la religion est une noble tache mais habituer l'enfant au gain facile et à la rue
dès son plus jeune âge est une catastrophe éducationnelle. C'est que la mendicité est érigée en
pratique courante et elle est si encrée que personne ne s'en offusque. Ils sont nombreux les
sénégalais partisans du moindre effort qui squattent les bureaux pour une mendicité insidieuse,
qui accablent leur frère parti se battre à l'étranger pour réclamer un mandat, qui jouent au
nécessiteux à la veille des grandes fêtes...
Au premier banc des accusés se trouve l'Etat. C'est à lui que revient, à titre principal, la
responsabilité de veiller à la sûreté et au bien-être des citoyens ainsi qu'au respect des lois et
règlements. LEtat a produit beaucoup de discours sur le phénomène mais, peu d'actions concrètes
reposant sur une volonté politique réelle, ont pu être observées. Or, dans un domaine aussi
sensible, intégrant l'impératif de protection des enfants, espoir d futur, "il vaut mieux faire que
dire". Si les petits mendiants avaient l'âge requis pour voter, l'Etat leur aurait peut-être accordé un
regard plus attentif, dans le cadre de sa logique clientéliste. Au lieu d'attaquer le fléau à la base,
on se contente d'actions ponctuelles en regroupant les talibés sous la caméra nationale un jour de
ramadan pour leur donner du riz au gras, on se limite à vanter les mérites des centres isolés aux
capacités d'accueil dérisoires, alors que l'écrasante majorité des enfants mendiants se trouve dans
la rue et parfois jusqu'aux heures tardives de la nuit, constituant des proies faciles pour les
pédophiles et les trafiquants d'enfants. Sachant que beaucoup d'écoles d'où sortent des enfants
certes rompus à la récitation du Coran, mais hautement diplômés en mendicité, sont sous le
contrôle de guides religieux, les gouvernants d'hier et d'aujourd'hui se gardent d'élever la voix
pour conserver la sympathie de ces guides religieux et capter les voies électorales de leurs fidèles.
Des ruptures décisives s'imposent.
La sensibilisation des personnes concernées semble avoir montré ses limites. Y a-t-il d'ailleurs
meilleure sensibilisation que l'image de ces bouts de bois de Dieu innocents tendant une main
famélique à des adultes souvent indifférents qui cherchent à peine à apaiser leur conscience en
faisant l'aumône à ces mendiants précoces ?
La reconnaissance officielle des écoles coraniques, leur dotation en cantines scolaires et en
associations de parents d'élèves pourraient être expérimentée.
La mendicité est interdite en tant que telle, mais il urge de construire un cadre législatif pour
punir, avec toute la rigueur que requiert la protection des citoyens vulnérables, tous ceux qui, de
près ou de loin, ont contribué à faire d'un enfant un mendiant. Ni les parents ni les maîtres ne
seraient alors épargnés.
Mais adopter une loi n'a jamais résolu un problème en Afrique où la réglementation est
souverainement bafouée par les citoyens et même par les gouvernants, souvent en toute impunité.
D'ailleurs, les dispositions pertinentes des conventions sur les droits de l'enfant ratifiées par le
Sénégal sont royalement ignorées. Il s'agira alors de mettre en place un dispositif draconien de
surveillance à tous les grands carrefours pour traquer ce fléau qui offre une triste image d'un pays
situé à la porte de l'Afrique.
Rosnert Ludovic AUSSOUTIN
t Ludovic AUSSOUTIN



26/07/2011
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